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Rapport d'activités de la HATVP : quel bilan tirer de l'année 2022 ?

Compliance

Yanisse Benrahou
LE JOURNAL

Rapport d'activités de la HATVP : quel bilan tirer de l'année 2022 ?

Le 31 mai 2022, la HATVP a publié son rapport d'activités. Ce nouveau rapport revient sur une année marquée par l'extension du répertoire des représentants d'intérêts au secteur public local et les premières saisines du parquet relatives à des représentants d'intérêtsDans son rapport, la HATVP met en avant une amélioration de la qualité des différentes déclarations recueillies par rapport aux exercices précédentsCette année encore, la Haute autorité garnit son rapport de propositions visant à améliorer le droit applicable à sa mission de contrôle

Dix ans après sa création, la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) a publié, le 31 mai 2022, un nouveau rapport d'activités. Cette année 2022 aura été marquée par une activité particulièrement importante, du fait des élections présidentielle et législative impliquant le renouvellement d'une part significative des déclarants d'intérêts et de patrimoine, à la suite de l'extension du répertoire des représentants d'intérêts aux activités locales ainsi qu'en conséquence de plusieurs affaires médiatisées sur le périmètre de compétence de la Haute autorité.

Cette année encore, la Haute autorité fait état d'une amélioration de la qualité des informations transmises, ce qui induit également une forme d'amélioration des contrôles exercés par la HATVP. En effet, pour l'ensemble des missions de contrôle exercées, il est possible d'observer que les contrôles et sanctions initialement concentrés sur le non-dépôt des informations requises se voient progressivement complétés par un contrôle de la qualité de l'information déposée. Or, cette amélioration qualitative est nécessaire à la transparence de la vie publique et à sa finalité revendiquée : « garantir la probité publique » (HATVP, rapp. d'activités 2022, p. 5).

Par ailleurs, la HATVP continue son travail de pédagogie visant à rendre plus accessible les normes relatives à la transparence et à la probité qu'elle contrôle. Cela se traduit néanmoins par une inflation documentaire voire normative. Il convient dès lors de revenir sur les différents supports publiés cette année par la HATVP.

Enfin, la Haute autorité use de nouveau de son expertise et de son pouvoir d'influence en vue de faire évoluer les normes législatives et réglementaires dont elle a la charge. Dans son rapport, elle a émis de nombreuses propositions sur lesquelles nous reviendrons.

1. Ce qu'il faut retenir de l'exercice 2022

A. – Le contrôle des patrimoines et intérêts des responsables publics

Quelques chiffres. – Au total, 18 000 responsables et agents publics étaient concernés, au titre de la loi n° 2012-907 du 11 octobre 2013, par une obligation de déclaration de patrimoine et/ou d'intérêts. En 2022, 5 245 responsables ont déposé 10 659 déclarations. Sur ces déclarations, 4 170 ont fait l'objet d'un contrôle et pour près d'un tiers d'entre elles, la déclaration initiale était conforme aux exigences de la HATVP. En conséquence, la Haute autorité constate ainsi une baisse de près de 50 % du nombre de déclarations par rapport à 2021. En effet, beaucoup de ces déclarations n'étaient que modificatives.

Le plan de contrôle. – La Haute autorité continue de renforcer sa procédure de contrôle des déclarations. Si, dans le cadre des contrôles, cette dernière s'appuie notamment sur les bases de données de l'administration fiscale, sur les administrations partenaires ou sur les pièces obtenues par la DGFIP, elle insiste néanmoins sur les échanges effectués avec les déclarants. En effet, des échanges ont eu lieu avec 37 % des déclarants, le plus souvent à l'initiative de la HATVP. Cette pratique permet d'instaurer un dialogue pédagogique avec le déclarant dès lors qu'une déclaration met au jour une difficulté.

Par ailleurs, la HATVP continue de s'appuyer sur la société civile. En 2022, la Haute autorité a reçu 52 signalements de la part des associations agrées, journalistes ou citoyens ayant conduit à ouvrir ou rouvrir 8 dossiers de contrôles.

Sur les 4 170 déclarations contrôlées, 33,2 % ont été jugées conformes. Ce qui permet à la Haute autorité de constater une progression dans la qualité des déclarations. Ces contrôles ont donné lieu à la transmission de 51 dossiers au parquet dont 41 pour non-dépôt et 10 pour manquements déclaratifs ou pour manquement au devoir de probité.

Focus sur les conflits d'intérêts. – Sur les 2539 déclarations d'intérêts contrôlées en 2022, 69,1 % des contrôles ont permis d'identifier des risques de conflit d'intérêts nécessitant d'adopter des mesures de prévention. Pour les élus départementaux et régionaux le taux dépasse les 90 %. Pour rappel, lorsque les échanges avec le déclarant s'avèrent infructueux et que celui-ci refuse la mise en place des mesures recommandées, la Haute Autorité peut adopter une injonction de faire cesser le conflit d'intérêts. Le non-respect d'une telle injonction constitue une infraction pénale. En 2022, la Haute Autorité a adressé une injonction de ce type.

Outil(s) utile(s). – La Haute Autorité observe, « au fil des échanges qu'elle entretient avec les élus locaux », que la notion de conflit entre intérêts publics, « qui constitue une spécificité française », présente encore des difficultés dans sa mise en œuvre. Aussi, après avoir adopté, en 2022, deux avis précisant sa doctrine sur l'application du nouveau régime applicable aux conflits d'intérêts (HATVP, délibération n° 2022-150, 3 mai 2022 ; HATVP, délibération n° 2022-465, 29 novembre 2022.), la Haute Autorité a publié une communication sur son site Internet. Ce support offre un résumé des positions adoptées, les deux délibérations et un tableau récapitulatif (www.hatvp.fr/presse/le-conflit-dinterets-publics-apres-la-loi-3ds/).

B. – Le contrôle des mobilités professionnelles entre les secteurs public et privé

Quelques chiffres. – En 2022, la Haute autorité a rendu 581 avis sur des projets de mobilité entre les secteurs public et privé. Sur ces délibérations, 27,2 % d'entre elles étaient des avis de compatibilité et 69 % étaient des avis de compatibilité avec réserve. Seulement 3,8 % des situations ont donné lieu à des avis d'incompatibilité. Ces avis d'incompatibilité concernent principalement des mobilités vers le secteur privé qui présentent le risque de compromettre l'indépendance et l'impartialité de l'administration voire des risques de prise illégale d'intérêts.

Le nombre de saisine était en forte hausse en 2022 du fait d'une actualité politique riche notamment ponctuée par la nomination du nouveau Gouvernement intervenu en mai 2022 et le remaniement du mois de juillet.

Le plan de contrôle. – La Haute autorité a pu faire le bilan de la 2e année de plein exercice de cette mission de contrôle des mobilités. Au cours de cet exercice, elle s'est attachée à identifier « très tôt » les saisines sur lesquelles elle n'avait pas lieu de statuer en raison de son incompétence. Il convient de citer les cas d'incompétence manifeste, notamment lorsque l'activité en cause « est réalisée pour une association et n'est pas rémunérée ou parce qu'elle est réalisée dans un établissement public qui, d'après une doctrine établie du collège de la Haute Autorité, n'exerce pas ses activités dans un secteur concurrentiel » (Rapp. HATVP, p. 86). Dans ces hypothèses, la HATVP en informe l'administration qui, le plus souvent, retire sa saisine. Il en va de même pour les hypothèses d'irrecevabilité. Avec ce nouveau fonctionnement, la Haute autorité a pu raccourcir les délais de traitement des dossiers et réduire le nombre d'avis d'irrecevabilité ou d'incompétence : ce dernier est de 3,8 % en 2022.

Focus sur la situation des cabinets ministériels et des collaborateurs du président de la République. – Au total, la Haute autorité a contrôlé 183 déclarations de situation patrimoniale et 235 déclarations d'intérêts. Sur ces situations, la HATVP n'a identifié que 9,2 % conflits d'intérêts nécessitant d'adopter des mesures de déport. Ce taux, très inférieur à la moyenne de 69,1 % constatée sur l'ensemble des déclarations, serait la conséquence du profil des déclarants : « en moyenne plus jeunes, ils disposent de relativement moins de liens d'intérêts » (HATVP, rapp. d'activité 2022, p. 95). Il convient néanmoins de souligner que ce périmètre représente une part importante de l'activité de la HATVP. Cette dernière a rendu 230 avis sur des projets de nomination de membres des cabinets ministériels et collaborateurs du président de la République, soit 96 % du total des avis préalables à la nomination rendus cette année. Les mobilités vers le secteur privé des membres de cabinets ministériels et collaborateurs du président de la République représentent 55,7 % des saisines reçues en 2022. Sur les 177 délibérations émises, 174 étaient des avis de compatibilité dont 160 assortis de réserves, pour seulement 3 avis d'incompatibilité. Ces chiffres divergent de ceux observés pour les autres agents publics pour lesquels sont émis davantage d'avis de compatibilité simple (26,7 %) et d'incompatibilité (12 %).

Outil(s) utile(s). – Afin de disposer d'éléments suffisamment précis pour apprécier la compatibilité du projet d'un agent avec ses fonctions publiques, la Haute autorité a édité un formulaire type permettant aux autorités hiérarchiques de renseigner tous les éléments d'analyse utiles. C'est sans doute ce qui explique l'amélioration de la qualité des dossiers de saisine. Ce formulaire peut être transmis sur simple demande à l'adresse

secretariat.juridique@hatvp.fr.

Par ailleurs, la HATVP a consolidé sa doctrine relative à la qualification des établissements publics exerçant leurs activités dans un secteur concurrentiel conformément aux règles de droit privé. Elle a notamment publié deux délibérations, disponibles sur son site internet, sur le sujet. Une première délibération n° 2022-436 du 15 novembre 2022 au titre de laquelle les activités exercées au sein du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives ne devaient pas être regardées comme des activités lucratives. Une autre délibération n° 2022-229 du 18 octobre 2022 considérant que les activités de la RATP devaient être qualifiées de lucratives.

Il convient enfin de souligner que la HATVP a rendu publics deux avis d'incompatibilité afin de faire connaître sa doctrine (HATVP, délib. n° 2022-123, 5 avr. 2022 ; HATVP, délib. n° 2022- 135, 19 avr. 2022).

C. – Le contrôle de l'activité de représentation d'intérêts

Quelques chiffres. – Au 31 décembre 2022, 2584 entités étaient inscrites au répertoire des représentants d'intérêts et 11 105 activités avaient été déclarées sur le répertoire. Au sein de ces déclarations, les sociétés et organisations professionnelles demeurent prédominantes en représentant 55 % des dépôts et sont suivies des associations et ONG qui constituent 19.5 % des déclarations. Il convient également de souligner que 62,5 % des fiches d'activités concernent le Parlement et 57,5 % le Gouvernement. Par ailleurs, 32.5 % des actions portent sur l'élaboration de la loi et le ministère de l'Économie et des Finances ainsi que ministère de l'Environnement, de l'Énergie et de la Mer concentrent un tiers des activités.

À la suite des relances de la HATVP, le taux de dépôt était de 90 % en juillet 2022 et 98 % à la fin de l'année. La Haute autorité constate, une nouvelle fois, une amélioration de la qualité des déclarations ce qui induit une amélioration de la qualité des contrôles (Y.  Benrahou , Réguler le lobbying représente des intérêts : Rev. int. Comliance 2022, 204). Plus précisément, selon l'algorithme élaboré par la Haute Autorité 71 % des objets déclarés sont conformes aux exigences minimales de lisibilité définies par la Haute Autorité contre 69 % l'année précédente. Concernant la rubrique « observations », la Haute autorité considère qu'elle pourrait être davantage exploitée par les représentants d'intérêts pour compléter leurs déclarations d'activités notamment pour préciser le contexte de leur action ou indiquer le responsable public rencontré. Cette dernière n'a été utilisée en 2022 que dans 17 % des cas, contre 20,5 % en 2021.

Plan de contrôle. – Au cours de l'exercice 2022, la HATVP a clôturé 119 contrôles. Plus précisément, les contrôles se composent de 67 contrôles de non-inscrits dont 61 % ont abouti à une inscription sur le répertoire et de 52 contrôles des déclarations dont 100 % ont donné lieu à des modifications. L'année 2022 a été marquée par une très forte augmentation du nombre de mises en demeure. En effet, les contrôles ont donné lieu à 76 mises en demeure, dont 19 ont été rendues publiques, contre seulement une en 2021. Par ailleurs, alors que la HATVP n'avait jamais fait usage de ce mécanisme auparavant, 8 dossiers ont fait l'objet d'une transmission au parquet.

En 2022, la Haute Autorité a poursuivi ses contrôles sur plusieurs secteurs d'activités déjà considérés comme stratégiques en 2021 :

• l'environnement, l'énergie et l'agroalimentaire ;

• la santé ;

• le numérique et l'audiovisuel ;

• l'immobilier, la construction et le BTP.

Il convient également de souligner que 8 think tanks ont fait l'objet d'un contrôle pour non-inscription. En effet, au cours de l'exercice 2022, le collège de la Haute Autorité a considéré que les think tanks et autres groupes de réflexion devaient s'inscrire sur le répertoire des représentants d'intérêts dès lors qu'ils remplissaient la condition d'activité principale ou régulière d'influence. Le répertoire de la HATVP compte aujourd'hui une trentaine de think tanks.

Focus sur l'extension du répertoire à de nouvelles catégories d'agents publics et à certaines fonctions exécutives locales. – Depuis le 1er juillet 2022, le champ des décideurs publics auprès desquels les activités d'influences doivent être comptabilisées, inclus de nouveaux agents et responsables publics locaux, ce qui représente environ 18 000 personnes, « faisant du dispositif français l'un des plus étendus au monde » (HATVP, rapp. d'activité 2022, p. 110). La Haute autorité considère avoir anticipé cette extension et ne fait état d'aucune difficulté directement liée à celle-ci. Il semblerait néanmoins que la Haute autorité manque de recul pour dresser un bilan de ce premier exercice.

Outil(s) utile(s). – Dans l'optique de faciliter l'appropriation de l'extension du répertoire, la Haute autorité a publié sur son site internet un vade-mecum pour les déclarants (HATVP, Extension du répertoire des représentants d'intérêts – Vade-mecum pour les déclarants, juin 2022). Par ailleurs, de nouvelles lignes directrices à destination des représentations d'intérêts devraient être publiées, notamment pour formuler des interprétations sur certaines notions issues du cadre législatif et réglementaire relatif à la régulation du lobbying.

2. Les propositions de la HATVP

A. – Renforcer les prérogatives de la HATVP

Permettre à la Haute autorité d'exercer directement un droit de communication. – Cette proposition, contenue dans chacun des rapports de la HATVP depuis 2015 (https ://www.hatvp.fr/ressources-documents-utiles/#documentations), vise à doter la HATVP du pouvoir d'obtenir directement les documents utiles aux contrôles auprès des établissements bancaires ou financiers, des entreprises d'assurance ou de réassurance, des administrations, des collectivités territoriales ou de toute personne chargée d'une mission de service public.

Doter la Haute autorité d'un pouvoir de sanction administrative. – Depuis 2018, la HATVP propose de se voir reconnaître un pouvoir de sanction administrative en cas de manquement à l'obligation de dépôt d'une déclaration d'intérêts ou de situation de patrimoine par un responsable public, ou d'une déclaration d'activités par un représentant d'intérêts (HATVP, Rapport d'activités 2018, p. 148). La Haute autorité présente cette sanction comme une alternative à la sanction pénale, davantage efficace tout en « étant proportionnée à la gravité du manquement et à la situation de la personne poursuivie » (HATVP, rapp. d'activités 2022, p. 53).

B. – Faire évoluer le cadre juridique des déclarations de situation patrimoniales et d'intérêts

Soumettre les maires d'arrondissement de Paris, Lyon et Marseille à une obligation de déclaration de situations patrimoniale et d'intérêts. – En effet, il peut sembler incohérent que ces responsables publics ne soient pas soumis aux obligations déclaratives quand certains responsables de plus petites entités publiques le sont.

Soumettre les membres du Gouvernement à une obligation de transmettre à la HATVP, dans un délai d'une semaine suivant la nomination, une question de prévention des conflits d'intérêts. – Pour ce faire, la Haute autorité suggère l'adoption d'une circulaire par la Première ministre. Cette proposition résulte du constat suivant : lorsque les membres du gouvernement ont « pris l'initiative de se rapprocher d'elle dès les premiers jours suivant leur prise de fonction, certains membres du Gouvernement ont pu identifier plus rapidement les situations à risques, déposer leur déclaration dans un délai plus court et adopter de leur propre initiative des mesures de déport » (HATVP, Rapp. d'activités 2022, p. 65). En conséquence, il apparaît pertinent d'instaurer un échange systématique dès la prise de fonction.

C. – Améliorer le contrôle des mobilités entre les secteurs publics et privés

Étendre le champ des responsables publics soumis au contrôle de la HATVP. – La Haute autorité souhaite pouvoir contrôler les titulaires des fonctions exécutives locales visés au 3° de l'article 11 de la loi du 11 octobre 2013. Cela désigne les vice-présidents et conseillers titulaires d'une délégation de signature ou de fonction des conseils régionaux et départementaux et des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 100 000 habitants ainsi que les adjoints au maire des communes de 100 000 habitants titulaires d'une délégation de signature ou de fonction.

Étendre le champs des mobilités vers le secteur privé contrôlées. – La Haute autorité considère que les agents de certains établissements publics, du fait des enjeux dont ils traitent et quel que soit leur statut, devraient faire l'objet d'un contrôle des mobilités à l'occasion de leur départ vers le secteur privé. La Haute autorité évoque notamment l'UGAP, Solideo, la Caisse des dépôts et les offices publics de l'habitat. Il convient de souligner que pour ces établissements, la prise illégale d'intérêts dans sa version souvent désignée par le terme délit de pantouflage (C. pén., art. 432-13) pourrait être retenue. De ce point de vue, il apparaît cohérent d'envisager une extension du périmètre contrôlé par la Haute autorité.

Préciser les sanctions applicables par l'autorité hiérarchique. – La Haute autorité considère que le régime de sanctions de l'article L. 124-20 du code général de la fonction publique présente des lacunes (HATVP, rapp. d'activités 2022, p.92). D'une part, il semblerait que les sanctions ne puissent être prononcées que lorsqu'il y a eu un avis de la HATVP ce qui est « contraire à l'objectif poursuivi par la réforme opérée par la loi du 6 août 2019, qui a, pour l'essentiel, internalisé le contrôle des mobilités au sein des administrations » (HATVP, Rapport d'activités 2022, p. 92). D'autre part, ces sanctions ne sont pas définies ce qui ne permet pas à l'administration de pouvoir les mettre en œuvre. La Haute autorité insiste notamment sur la retenue sur pension qui soulève des questions concernant les modalités de sa fixation ou de l'impossibilité pour l'administration de procéder au recrutement de l'agent pendant 3 ans.

D. – Modifier le dispositif d'encadrement de la représentation d'intérêts

Apprécier le seuil de déclaration au niveau de la personne morale et non par personne physique. – Cette année encore, la Haute autorité préconise de modifier le décret n° 2017-867 du 9 mai 2017, dont l'article 1 énonce que sont des représentants d'intérêts toutes les entités « dont un dirigeant, un employé ou un membre entre en communication, à son initiative, au moins dix fois au cours des douze derniers mois avec » un responsable public en vue d'influer sur une ou plusieurs décisions publiques. Or, en appréciant à l'échelle individuelle plutôt qu'à celle de l'entité le nombre d'entrées en communication, ces dispositions permettent d'envisager une répartition interne des communications visant à éviter un dépassement des seuils. En conséquence, la rédaction actuelle du décret peut apparaître comme une absurdité, qui selon le président de la HATVP peut permettre de « contourner complètement la loi » (V. F. Vignal, Transparence : « Sur les représentants d'intérêts, on est très en retard », dénonce Didier Migaud, président de la HATVP : Public Sénat, 1er juin 2022).

Déclarer les activités à l'initiative des responsables publics. – À l'instar du critère précédemment évoqué, celui de l'initiative pose des difficultés du point de vue de la finalité de la régulation du lobbying. En effet, seules les communications à l'initiative du représentant d'intérêts sont comptabilisées. En conséquence, les actions conduites en réponse à une sollicitation d'un représentant public sont exclues. La Haute autorité préconise donc, comme dans chacun de ses rapports d'activités depuis 2019 (HATVP, rapp. d'activités 2019, p. 133), d'étendre l'obligation de déclaration des activités aux entrées en communication initiées par les responsables publics.

Permettre les déclarations consolidées. – Cette proposition vise à éviter une inscription au registre éclatée entre plusieurs entités du même groupe de société. Cette non-consolidation empêche d'avoir une vision globale des moyens alloués au lobbying au sein d'un même groupe. Par ailleurs, la HATVP considère qu'une telle modification assurerait une plus grande sécurité juridique au sein des groupes de sociétés (HATVP, Rapp. d'activités 2020, p. 122).

Préciser les critères des décisions publiques entrant dans le champs de la représentation d'intérêts. – Afin de compléter la loi qui énonce que l'activité de représentation d'intérêt consiste à influer sur une « décision publique, notamment sur le contenu d'une loi ou d'un acte réglementaire » (L. n° 2012-907, 11 oct. 2013, art. 18-2), le décret du 9 mai 2017 énonce en annexe les types de décisions publiques concernées en visant notamment la catégorie des « autres décisions publiques ». Le champ de ces décisions est réduit par plusieurs exclusions énoncées à l'article 1er du décret susvisé. Cependant, ces exclusions ne sauraient suffire à limiter l'insécurité juridique induite par la catégorie des « autres décisions publiques » surtout depuis l'extension du répertoire aux collectivités locales. La HATVP cite notamment les difficultés de qualification des démarches commerciales, des demandes de subventions ou des demandes d'autorisation de permis de construire (HATVP, Rapp. d'activités 2022, p. 110). Les nouvelles lignes directrices de la Haute autorité, prévues pour 2023, devraient pouvoir apporter des précisions sur ces points « mais une clarification doit être apportée par le législateur et le pouvoir réglementaire » (HATVP, Rapp. d'activités 2022, p. 110).

Mots clés : Compliance. - Haute autorité pour la transparence de la vie publique.

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La Semaine Juridique Administrations et Collectivités territoriales n° 26, 3 juillet 2023, act. 426